(extrait, page 13)
"Le rôle de la Cinémathèque suisse
Si le grand public comprend fort bien la raison d'être des bibliothèques, il n'est pas encore assez conscient chez nous de tous les services que peut rendre une cinémathèque. Certes, chacun peut aller emprunter un livre et le relire à sa guise ; n'importe qui ne peut aller emprunter un film et le projeter comme il lui plaît. Mais cela tient simplement à la nature particulière de l'expression cinématographique : la conservation de la pelliculle impressionnée n'est ni moins utile, ni moins indispensable pour autant, que celle des textes imprimés. Au contraire, pourrait-on même dire, car les exemplaires d'un livre seront toujours plus nombreux que ceux d'un film ; on aura toujours quelque chance de retrouver un texte ici ou là, de pouvoir le reconstituer, tandis qu'une bande détruite est perdue à jamais... Enfin, il existe pour l'imprimé la règle du dépôt légal : rien de pareil n'a encore été constitué pour le film.
Faut-il laisser aux pays grands producteurs de films le monopole des cinémathèques ? Ce serait une erreur capitale. Chaque pays a intérêt à conserver chez lui les oeuvres qui marquent l'évolution d'un art universel ; chaque pays se doit au surplus de préserver ce qu'il a pu produire de plus marquant dans chaque domaine. Si aucune cinémathèque suisse ne conservait les actualités de chez nous, les films documentaires tournés en Suisse, les films d'armée, et tant d'autres documents du même genre, personne ne s'en chargerait pour nous."
Georges Duplain